Pôle Régional des Musiques du Monde

 

Si Marseille est reconnue et admirée comme un espace de recomposition des singularités culturelles, le Pôle des musiques du monde est un des rares lieux, un des rares projets permettant d’expérimenter ou de vérifier les possibilités artistiques dès leur genèse. Et si certains lieux de diffusion initient - même timidement - des rapprochements entre public et émergences en Méditerranée, rares sont ceux qui poussent cette recherche jusqu’aux questionnements et aux expérimentations essentielles dans toutes les phases de la création, de l’écriture jusqu’au passage sur scène.

Depuis plus de dix ans, le Pôle invite des artistes de toute l’Europe et de la Méditerranée à dessiner les contours de cette Scène d’Intérêt National que nous souhaitons voir se concrétiser aujourd’hui.

 

Un lieu de référence pour les musiciens en création

La Cité de la Musique de Marseille a intégré depuis longtemps dans ses enseignements des musiques méditerranéennes de traditions savantes ou populaires afin d’encourager leur reconnaissance à un niveau académique plus élargi.
La création du PÔLE DES MUSIQUES DU MONDE est une autre concrétisation de cette intuition pour l’accompagnement et la valorisation de patrimoines en mutation, et son développement représente aujourd’hui une perspective déterminante pour les décisions en matière de création, de programmation et dans une plus large mesure toutes les actions de médiation et d’enseignement de la Cité. De nombreux artistes et
acteurs de ces musiques l’ont compris en France, en Région Sud particulièrement, et considèrent aujourd’hui le Pôle des Musiques du Monde comme un jalon important de la construction de leur projet artistique, de son évolution professionnelle et de sa portée publique.
Formation, accompagnement et recoupements esthétiques sont ainsi devenus, au fil des années, des éléments porteurs de l’architecture du Pôle, dans lesquels l’ancrage méditerranéen et le « creuset » marseillais déterminent un éco-système, les cadres d’une pensée alternative et décentralisée du développement.

 

Une plate-forme d’outils et de savoirs

Ainsi, Le fonctionnement du Pôle a trouvé appui auprès de partenariats locaux, pour une grande part issue du dynamisme associatif marseillais, notoirement vivace dans le secteur culturel, en liens constants et nourris avec les collectivités territoriales.
Passionnés de ces musiques, spécialistes et grand public, ont fait du Pôle un rendez- vous privilégié et un centre de ressources spécialisé, une passerelle aussi vers tous les enseignements spécifiques à ces esthétiques, que corroborent les missions fondamentales de la Cité de la Musique. Les savoirs et les pratiques spécifiques aux musiques du monde et aux musiques traditionnelles ont trouvé dans le Pôle un lieu de valorisation, de croisements, de partage d’outils et de moyens, en d’autres termes une plate-forme idéale de rencontres entre créateurs, professionnels et publics.

 

Saison 22-23 : pour jouer sans entraves

 

Les équipes invitées en création cette saison témoignent toutes de l’originalité et de la vitalité des productions artistiques évoluant entre des origines géographiques rêvées ou vécues et des volontés assumés de faire évoluer les point vue et dévier les parcours.

 

Du tango revisité de Louise Jallu aux retrouvailles d’Olivier Koundouno avec son passé camerounais, de la rencontre entre A Filetta - ensemble vocal corse à la
modernité fulgurante - et la poésie révolutionnaire du jeune égyptien Abdallah Miniawy,
des beat-box indiens du duo de Parveen et Ilyas Khan aux recherches d’Arthur Bacon sur
les swings rocambolesques du musette, l’ensemble de ces créations mettra en jeu les
évolutions et les réflexions qui bouleversent le monde actuel des musiques traditionnelles.
Dans le cycle des retrouvailles, celles qui uniront le percussioniste marseillais-cubain
Javier Campos à l’univers composite et luxuriant de Djé-Balèti viendront ranimer la
matrice bienveillante que devient souvent Marseille quand elle sait accueillir.


Un accent particulier sera émis par les ensembles vocaux féminins invités, que le Pôle
accueillera en résidence : Samaïa qui, après une tournée au Moyen-Orient, préparera lasortie de son nouveau disque et de son nouveau spectacle ; Unio, jeune trio qui invente un folklore de la combattivité féminine ; et Cocanha, duo fémininin qui révolutionne
avec tranquillité et assurance la vocalité occitane.
Et puis, nous aurons à cœur d’ouvrir le plateau à l’initiative solidaire de deux artistes emblématiques des scènes tunisienne et française, Imed Alibi et Zied Zouari, qui accueillent au sein du projet Mûlâkât des maîtres des musiques perse et afghane exilés en France.


Un autre type de création verra s’engager des artistes dont les talents d’invention
spontanée ou d’improvisation ont achevé de transformer les musiques traditionnelles depuis 20 ans : la bassiste improvisatrice Fanny Lasfargues en visiteuse de mondes sonores africains, Éléonore Fourniau dont la vielle embrase les mélodies antique du Kurdistan, Ottilie B et son incroyable talent de génératrice de sons et régénératrice de formes, Ann Waro et son Maloya du sensible, toutes ces artistes se produiront dans un dispositif de laboratoire de création spontanée où la présence publique ne gênera ni les trouvailles ni les introspections, mais les conviera au contraire au plateau en compagnie d’autres artistes stimulants, peintres-performeurs, dessineurs de sons ou créateurs-lumières. Ce dispositif sera visité aussi par des artistes de la scène marseillaise comme Anass Zine, des inventeurs aujourd’hui reconnus comme Ernest Bergez, par la lutherie électro-acoustique fragile et puissante de Loup Uberto ou par les élucubrations salutaires de l’incontestable Fantazio.


L’effervescence et la diversité des invitations ne fera pour autant pas l’impasse sur les
maîtres vivant près de nous, comme Djamchid Chémirani et ses enfants, ou d’autres qui
nous rendent fréquemment visite comme André Minvielle, qui sera marseillais à plusieurs
reprises cette saison. C’est dans le soucis de faire entendre ces maîtres incontestés dont
le grand public ignore souvent la proximité que nous inviterons aussi Tarek Abdallah
- maître et commentateur de la virtuosité du ‘Ud - accompagné de ‘Adel Chems Al
Dine aux percussions, comme nous installerons le plateau dans l’intimité précieuse du
dialogue que mènent depuis 20 ans le percussionniste Youssef Hbeish avec le Oudiste
Ahmad Al Khatib.

 

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Une Scène de Création Musicale dans une École de Musique

La caractéristique du Pôle des Musiques du Monde est qu’il est intégré à La Cité de la Musique de Marseille qui, en tant que lieu d’enseignement artistique, développe dans ses programmes d’études, de recherche et de documentation un intérêt continu pour les musiques Traditionnelles et les Musiques du Monde. Cet intérêt a vu, par exemple, l’émergence de pratiques de musiques afro-caribéennes ou arabo-andalouses, de Bal Folk ou de musiques des Balkans dans les cours dispensés. Les propositions d’enseignants créatifs et dynamiques dans ces esthétiques ont retenu les suffrages des publics d’élèves, formés en ateliers et cours académiques ou invités à rejoindre des créations sur scène lors d’évènements marquants de la vie culturelle marseillaise.
Ce constat nous inspire plusieurs
développements et conclusions, qui sont loin de mettre en opposition cette activité avec les exigences d’une Scène d’Intérêt National Art et Création.
Exemplarité, émulation : les artistes
représentants de ces esthétiques, invités à enseigner dans l’enceinte de la Cité de la Musique, ont contribué à élargir les publics et à former une jeune génération ouverte à ces pratiques. La coexistence d’activités de création et d’enseignement fournit constamment à notre région de nouveaux publics et de nouvelles sensibilités musicales, en même temps qu’elle diversifie le champs des enseignements dispensés dans le cadre d’une institution publique. En découvrant leurs enseignants et les artistes qui les accompagnent sur scène, les élèves, leurs parents et leur entourage perçoivent concrètement les bénéfices techniques et esthétiques de la transmission de ces savoirs, des applications et des extensions
potentielles et une sensibilisation aux enjeux
de leurs propres possibilités de création dans leurs domaines d’apprentissage spécifiques. Les qualités d’improvisation et de création spontanée inhérentes aux musiques traditionnelles facilitent d’autre part un accès enrichi aux mécanismes de la création, au maniement des influences, à la citation et à la relation entre les différents courants artistiques que les élèves seront amenés à fréquenter.